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Réunion multipartite sur l’emploi des seniors : le gouvernement doit prendre davantage d’engagements


La réunion multipartite organisée à Bercy le 26 juin avec Christine Lagarde, Xavier Bertrand et Laurent Wauquiez fait suite aux propositions formulées par le gouvernement sur le thème de l'emploi des seniors dans le document remis le 28 avril dernier aux partenaires sociaux. Elles ont été discutées lors d'un groupe de travail le 15 mai 2008 et d'échanges bilatéraux avec les partenaires sociaux (la CFDT a été reçue le 6 juin). L'objectif de la réunion était d'examiner les arbitrages gouvernementaux qui ont été pris suite aux différentes bilatérales, sur la base d'un document comprenant 6 fiches (voir autre article pour le document du gouvernement).

Le gouvernement a proposé des mesures par fiche dont les intitulés sont :
 Favoriser une gestion active des âges dans les entreprises et les branches par la conclusion d’accords en faveur de l’emploi des seniors
 Favoriser le maintien des seniors dans l’emploi en supprimant les limites d’âge et à la mise à la retraite d’office
 Eviter le recours aux "préretraites" de fait en harmonisant le régime social et fiscal des indemnités de rupture du contrat de travail
 Favoriser le cumul entre pension de retraite et revenu d’activité pour les assurés ayant eu une carrière complète
 Favoriser la prolongation d’activité des seniors en rendant la surcote plus attractive
 Relever progressivement l’âge de dispense de recherche d’emploi (DRE) et accompagner les seniors pour favoriser leur retour à l’emploi. »

Christine Lagarde présente des chiffres sur l’emploi des seniors : elle parle d’un véritable gâchis et rappelle que la France est le « mauvais élève de la classe européenne ». Xavier Bertrand précise que cette réunion n’est pas conclusive sur la question des retraites. Il annonce sur ce sujet des rencontres avec les partenaires sociaux avant fin juillet et des réponses en septembre.

La CFDT rappelle que l’enjeu est aussi de diminuer le rapport entre les actifs et les inactifs afin de soulager les premiers d’une charge trop lourde. La CFDT souligne la nécessité d’aborder la question de l’emploi des seniors sous l’angle des problèmes sociaux individuels et pas seulement sous un angle macro-économique. Notre objectif est de permettre aux salariés de construire et d’améliorer leur parcours professionnel afin qu’ils puissent partir à la retraite dans de bonnes conditions, avec une retraite à taux plein. Le problème de l’emploi des seniors est un enjeu national qui nécessite d’être traité dans la complémentarité entre dialogue social et politique publique.

Relever le défi de l’emploi des seniors est compliqué

Ce n’est pas une population homogène et les réponses à apporter sont donc à moduler en fonction des situations. L’Etat doit fournir des indicateurs quantitatifs et qualitatifs plus précis et des éléments de diagnostic sur la situation des seniors dans l’emploi. L’âge des travailleurs est moins un problème que leur niveau de formation initiale et continue, le type d’emploi occupé, le dynamisme du secteur d’activité…

Le fonctionnement du marché du travail contribue à marginaliser une partie de la population, notamment au début et à la fin des parcours professionnels. Les seniors et les jeunes ayant le plus souvent en commun un faible niveau de qualification.

Il faut sortir d’un consensus social vieux de plusieurs décennies faisant des seniors la variable d’ajustement des effectifs dans une période de chômage de masse et de fortes restructurations.

Dépasser ces difficultés, sortir de certaines logiques, impose de mettre en place d’autres types de politiques, d’autres mécanismes mais aussi d’autres relations sociales pour inciter les salariés à rester.

Les partenaires sociaux ont pris leurs responsabilités, à travers l’accord modernisation du marché du travail, qui engage des réformes structurelles.

La CFDT réaffirme donc son engagement à se saisir de cette question dans le cadre des négociations interprofessionnelles à venir prévues dans cet accord (GPEC, formation professionnelle et assurance-chômage). Une politique intégrée est nécessaire sur ce dossier pour faire réellement évoluer la situation.

Dans ce cadre, la responsabilité sociale des entreprises doit être abordée et les employeurs publics ne doivent pas être exemptés de cette responsabilité.

Mais cela ne suffit pas : la CFDT appelle à un engagement du gouvernement à la hauteur de l’enjeu et des objectifs européens qui ne se limite pas « à surveiller » les partenaires sociaux notamment sur l’aménagement des secondes parties de carrières et les possibilités de cessation progressive d’activité.

Par exemple, dans le cadre de la conférence sur les conditions de travail, aucune priorité sur les seniors n’a été affichée par l’Etat alors que les évolutions démographiques posent, hors de tout autre considération, la question de l’adaptation des conditions de travail à une population en moyenne plus âgée que par le passé.

La CFDT a fait un retour sur l’ensemble des propositions en signifiant toutefois que certaines d’entre elles nécessitaient un délai de réflexion, les documents de travail ayant été fournis deux heures à peine avant le début de la réunion.

La CFDT indique son accord nuancé avec plusieurs propositions gouvernementales

Les accords sur l’emploi des seniors devront être négociés dans les branches et les entreprises d’ici fin 2009, sous peine d’une cotisation additionnelle à l’assurance vieillesse. Ils « devront répondre à un cahier des charges minimal fixé par voie réglementaire ». La CFDT considère que c’est une réponse à ses exigences concernant la RSE. Elle souhaite cependant que le contenu de ce cahier des charges soit négocié par les partenaires sociaux.

La CFDT est également en accord avec le principe de l’augmentation de la surcote (même si elle souhaite une plus forte augmentation la première année) et le fait qu’elle s’applique aux pensions portées au minimum contributif. Elle demande son application pour les bénéficiaires des carrières longues.

La suppression des limites d’âge et de toute mise à la retraite d’office par l’employeur nous semble être une mesure indispensable. Nous réservons notre réponse sur l’harmonisation du régime social et fiscal des indemnités de rupture du contrat de travail : nous avons besoin d’un temps de réflexion sur ce point.

Le gouvernement propose aux partenaires sociaux d’ouvrir des négociations sur le thème de la transition progressive vers la retraite et de la refonte du dispositif de retraite progressive. La CFDT est très intéressée par ce thème mais réserve toutefois sa réponse. Cette question ne relève pas uniquement de la responsabilité des partenaires sociaux.

Le gouvernement annonce l’ouverture de discussions avec les employeurs publics, dans le cadre d’une concertation sur les conditions de travail et de l’emploi des seniors le 15 juillet prochain. La CFDT s’en félicite et approuve le fait que les employeurs publics se soumettent aux mêmes règles que celles que le gouvernement propose pour le privé.

La CFDT est en désaccord sur deux points importants

La libéralisation du dispositif de cumul emploi-retraite comporte des risques importants : effets d’aubaine, pression à la baisse sur les salaires. Il faut maintenir le délai de carence de 6 mois entre le départ en retraite et la reprise d’activités. Il y un consensus entre les organisations syndicales pour s’opposer à cette proposition.

La suppression de la dispense de recherche d’emploi (DRE) : il faut d’abord améliorer les possibilités de retour à l’emploi des seniors au chômage, avant de supprimer le dispositif. Cette question relève de la négociation assurance-chômage. Là encore, les organisations syndicales sont unanimement réservées.

Enfin, la CFDT a mis en garde le gouvernement sur la communication qu’il pourrait mener sur l’emploi des seniors : c’est un problème qui demande des réponses structurelles, il n’y a pas de recettes miracles en la matière. Il convient donc de renoncer aux effets d’annonce.

La CFDT rappelle sa proposition de sanctionner les entreprises. Elle ne peut se limiter à l’ouverture ou non de négociations et que le travail sur le cahier des charges est fondamental (nous insistons sur ce point car le gouvernement souhaite instaurer ces sanctions par voie réglementaire dès septembre).

Il faut des résultats concrets pour les salariés :ils doivent pouvoir se maintenir dans de meilleures conditions sur le marché du travail jusqu’au moment de leur retraite. Sinon, il y aura bien plus d’argent dans les caisses mais les situations individuelles resteront difficiles. Enfin, l’Etat ne peut pas se contenter de fixer des règles et de se positionner comme « gendarme » en renvoyant aux partenaires sociaux les mesures à prendre. Il doit s’impliquer davantage et structurer une dynamique de suivi des résultats.

Les organisations patronales ont déclaré être inquiets (UPA) voire hostiles face au dispositif de sanction (CGPME, Medef). Le Medef refuse que les entreprises soient désignées comme les bouc-émissaires de la situation de l’emploi des seniors, en parlant de co-responsabilité des salariés, qui souhaitent partir à la retraite le plus tôt possible.

Cette réunion devrait se poursuivre par un travail technique entre les partenaires sociaux et le gouvernement, qui entend leur présenter les projets de textes correspondant aux mesures proposées à la fin de l’été ou à l’automne.