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Crues et inondations


« Que d’eau, que d’eau ! » Le président Mac Mahon aurait lancé cette exclamation en visitant les régions sinistrées par les terribles crues de la Garonne en 1875.

Cette remarque, assurément un peu courte et peut-être apocryphe, fut largement brocardée par les humoristes et journalistes de l’époque. Et pourtant ! C’est bien cette réaction effarée que suscitent les images des inondations du bassin de la Seine en février 2018.

Le régime très irrégulier des cours d’eau est une des caractéristiques des pays tempérés. En France, depuis le Moyen Âge, les chroniques font état de crues récurrentes plus ou moins dévastatrices. Des pluies persistantes gonflent le fleuve, il sort de son lit et envahit terres et villes qui le bordent.

Le Rhône inonde Lyon en 1856 et la Seine inonde Paris en 1910

Sont gardés dans la mémoire nationale de nombreux exemples. En 1856, le Rhône inonde la moitié de la ville de Lyon causant des morts et provoquant l’écroulement de centaines de maisons. L’empereur Napoléon III visite les lieux au cours de ce qu’il nomme « un voyage compassionnel ». Et en 1858, une première loi voit le jour sur la zone d’expansion des crues.

À Paris, la grande crue de 1910 est évoquée à chaque débordement de la Seine. Le niveau du fleuve s’était exhaussé de 8 mètres par rapport à son niveau moyen. L’eau s’engouffre dans les aménagements récents de la ville : égouts, métro. Les pavés de bois qui recouvrent alors les rues sont déchaussés et flottent. On compte 150 000 sinistrés.

Et de façon plus anecdotique, le préfet Lépine ne pouvant plus assurer le ramassage des ordures décide l’opération « Ordures au fil de l’eau » : les ordures sont jetées des ponts au grand dam des communes riveraines en aval !

On pourrait multiplier les exemples d’inondations : la crue catastrophique du Tarn en 1930, mais aussi la soudaineté de la crue de l’Ouvèze en 1992, à Vaison-la-Romaine, où un flot, haut de 17 mètres, emporte tout sur son passage.

La prévention

Les méthodes diffèrent selon les époques et les cours d’eau : endiguement souvent, barrages écrêteurs de crues, lacs déversoirs. En 1987, l’État a mis en place un Plan de prévention des risques des inondations. Le PPRI est un document cartographique qui doit définir pour chaque commune les zones de constructibilité en se basant sur les crues de référence.

Mais depuis toujours, les hommes construisent au bord de l’eau, et des milliers de communes retrouvent ainsi une partie de leur territoire classée en zone rouge inconstructible, ce qui souvent entre en conflit avec la pression démographique.

L’artificialisation des sols

Aujourd’hui, la modification rapide de l’environnement par l’activité humaine aggrave les crues : on construit, on bétonne, on goudronne. Les villes s’étendent, les centres commerciaux de périphérie urbaine dévorent les espaces naturels. Le mitage des campagnes, les maisons hors agglomération obligent à créer routes, réseaux d’adduction.

Un rapport de l’Inra (l’Institut national de la recherche agronomique) constate que, entre 2006 et 2017, c’est la surface d’un département moyen, comme le Gard ou la Charente, qui a été artificialisé ! De plus, les techniques agricoles actuelles ont souvent un effet néfaste : la disparition des haies, les pratiques culturales intensives avec engins géants et pesticides durcissent et imperméabilisent les sols.
C’est ainsi que l’emprise humaine en augmentation, le dérèglement climatique, l’agriculture intensive se conjuguent négativement. L’eau, au lieu de pénétrer la terre, ruisselle et grossit les cours d’eau. Le phénomène régulier et naturel des crues se transforme de plus en plus souvent en inondations catastrophiques.

Françoise Berniguet

Février 2018 à Paris : le quai de Grenelle et l’île aux Cygnes.
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