UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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Les immigrés en France 2/5


Au 1er janvier 2022, la France entière (Métropole et outre-mer) comptait près de 7 millions d’immigrés sur 67,6 millions d’habitants, selon les chiffres de l’Insee. Ce dernier comptabilise, dans la catégorie immigrés, 4,3 millions d’étrangers, mais aussi 2,5 millions de personnes qui ont acquis la nationalité française.

Sommaire du dossier
 S’il te plaît, dessine-moi un immigré 1/5
 Les immigrés en France 2/5
 Droit du sang, droit du sol et aide médicale 3/5
 Le projet Migr’action de l’Union régionale CFDT Île-de-France 4/5
 Questions à Lydie Nicol, secrétaire nationale de la CFDT, responsable de la politique d’immigration 5/5

Selon la définition adoptée par le Haut conseil à l’intégration par la France et officialisée en 1991, un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. La qualité d’immigré est permanente, même si la personne a acquis la nationalité française (1).

Ainsi, les données du recensement 2020 montrent que, parmi les 5,1 millions d’étrangers résidant en France, 4,3 millions sont des immigrés, car nés à l’étranger. Pour le reste, il s’agit très majoritairement de mineurs nés en France et pouvant devenir Français à leur majorité.

Les réfugiés ou demandeurs d’asile

Les demandes d’asile ne sont que l’un des motifs de migration vers la France, et pas le plus important. Les guerres civiles et les interventions étrangères ont provoqué de vastes mouvements d’exil depuis une quinzaine d’années. Quel impact ces mouvements ont-ils eu en France et en Europe ? Entre 2014 et 2020, la France n’a accueilli que 3 % des 6,8 millions de Syriens ayant fui leur pays. À plus de 80 %, ils sont allés vers des pays voisins de la Syrie. Le constat est identique pour les Irakiens et les Afghans. Au total, pour ces trois pays, il y a eu 106 000 demandes traitées en France, soit 4,5 % des 2,33 millions déposées dans l’Union européenne.

Ces trois pays ne représentent que 16 % des demandes d’asile déposées en France. D’autres émanent de pays comme la Côte d’Ivoire, le Bangladesh, la Guinée, la Turquie, l’Albanie, la Géorgie, le Pakistan, le Nigéria, les Comores, et cette liste évolue d’une année à l’autre. Au total, la France enregistre 18 % des demandes d’asile déposées dans l’Union européenne, soit un pourcentage qui correspond au poids de son PIB. Elle prend sa part des demandes enregistrées, mais pas des décisions de protection car les trois quarts des demandes d’asile sont rejetées.

Pour les familles ukrainiennes, en 2022, l’Union européenne a pris, pour la première fois, la décision d’activer un dispositif de protection temporaire, valable six mois, et qui n’exige pas de déposer une demande d’asile, dispositif existant depuis 2015. Cette protection temporaire a permis d’aider de nombreux exilés, grâce à un engagement intense de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), des préfets, des communes, des associations et de nombreux citoyens. Le seul précédent connu d’une telle mobilisation est l’accueil des Boat-People, en plusieurs vagues de 1979 à 1989, pour 120 000 Vietnamiens et Cambodgiens qui avaient fui les régimes communistes de leurs pays.

Les immigrés en situation irrégulière

Parmi les sujets de crispation autour de l’immigration en France, celui des étrangers en situation irrégulière revient régulièrement sur le devant de l’actualité. Et le discours dominant est simple : fermeté envers les clandestins, aide à l’intégration pour ceux qui sont en situation régulière et qui respectent nos lois. Sauf que les choses ne sont pas si simples. Nombre d’immigrés en situation régulière sont d’abord passés par une période d’irrégularité. Les délais de traitement des préfectures n’y sont pas pour rien. Et, pendant cette longue attente, ces personnes travaillent pour gagner leur vie, avec parfois des conditions de travail indignes, et sont enfermées dans une grande précarité. Ainsi, près de 40 % des personnes ayant obtenu leur premier titre de séjour en 2018 pour liens personnels et familiaux étaient arrivés en France avant 2010.

Près de dix ans d’attente, avec toutes les conséquences qui en découlent pour les familles, et notamment les enfants scolarisés. Combien de jeunes apprentis formés en France n’ont pu être recrutés par une entreprise, alors qu’ils étaient motivés et compétents faute d’avoir pu obtenir un titre de séjour lors de leur passage à l’âge adulte ?

À l’inverse, passer d’une situation régulière à une situation irrégulière est aussi souvent le cas, notamment en raison de dysfonctionnements des services de l’État, liés au manque de personnels des services préfectoraux. Si ces derniers ne peuvent assurer dans les délais un rendez-vous pour un renouvellement de titre de séjour, l’étranger concerné perd son titre. Ces dysfonctionnements ont d’ailleurs été reconnus par le ministre de l’Intérieur en personne.

La France, pays d’immigration

Il est courant d’entendre parler d’immigrés de deuxième génération. Il s’agit là des personnes nées en France d’au moins un parent immigré. Selon l’Insee, elles sont environ 7,7 millions, réparties à égalité entre les enfants de deux immigrés et les enfants de couples mixtes. Or ces enfants sont, dans la plupart des cas, de nationalité française, soit par droit du sang, soit par droit du sol.
Près d’un quart des adultes vivant en France sont soit immigrés eux-mêmes, soit nés en France d’au moins un parent immigré. On sait aujourd’hui qu’ils ne sont plus que 5 % à avoir les quatre grands-parents immigrés, au sens Insee du terme.

Cela tient en grande partie à l’ampleur des unions mixtes dès la deuxième génération, d’un brassage qui progresse au fil des générations. C’est souvent la preuve d’une intégration réussie. Renvoyer en permanence ces immigrés vers une origine, réelle ou supposée, est sans doute la plus importante des erreurs sur le sujet de l’immigration.

Il existe une immigration liée à la libre circulation des ressortissants de l’Espace économique européen, mais elle se révèle bien décevante pour la France. Les populations qui pourraient s’y installer ont manifestement d’autres préférences.

Si les mouvements de population sont alimentés par les conflits armés, notamment au Moyen-Orient et en Afrique subsaharienne, une part non négligeable est liée au développement économique des pays tiers. Ceux qui émigrent en temps de paix ne sont pas les plus pauvres, mais plutôt ceux qui occupent une position moyenne, parce que, pour pouvoir émigrer, il faut en avoir les moyens. Durcir les conditions d’accueil et d’intégration des immigrés, c’est ouvrir la porte à toutes les stratégies pour atteindre leur objectif, y compris en les jetant dans les bras de ceux qui vont profiter de leur situation.

(1) Source pour l’ensemble de l’article, sauf indication contraire : François Héran, « Immigration : le grand déni », Seuil, coll. La République des Idées, mars 2023, 13,50 euros.